Une famille renaît : comment une rivière a sauvé une vie et a changé à jamais un village.

Une famille renaît : comment une rivière a sauvé une vie et a transformé à jamais un village

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Le jour était froid, et le courant glacé de la rivière coulait avec force, mais Grimmy, dix ans, ne se doutait pas que son chemin du retour de l’école allait bouleverser sa vie pour toujours. Il se hâ­tait de regagner son petit village près de Lozovaya, impatient de voir le veau nouveau-né et d’aider sa mère, Lanna Smith, qui s’était affairée à la ferme toute la journée.

Sa mère lui avait demandé de réchauffer le déjeuner, de faire la vaisselle et de terminer ses devoirs. Mais c’était surtout la perspective de rencontrer le petit veau qui le poussait à rentrer plus vite : assister à sa première tétée était toujours un événement. Il s’avançait le long du bord de la rivière, là où la glace avait déjà fondu et où l’herbe fraîche commençait à percer le sol.

 

En arrivant à un méandre, Grimmy s’arrêta net : une vieille femme frêle était assise sur la berge, tremblante de froid. Ses vêtements étaient détrempés, et ses larmes se mêlaient à l’eau de la rivière.

— Bonjour ! Que s’est-il passé ? demanda Grimmy en courant vers elle. Vous êtes tombée dans l’eau ?

— Oh non, mon petit ! gémit-elle, la voix brisée de chagrin. On m’a poussée ! Je pensais pouvoir atteindre le village, peut-être que quelqu’un m’aurait aidée à me réchauffer, mais la crampe… je n’arrive ni à respirer ni à bouger !

— Mamie, attendez-moi ! s’écria Grimmy en repartant au galop vers le village.

Chez eux, Lanna finissait de s’occuper de la vache dans l’étable, cherchant à faire descendre le lait de leur Zorya. Soudain, la voix pressante de son fils résonna dans la maison :

— Maman ! Il y a quelqu’un qui est en train de mourir près de la rivière !

Le cœur de Lanna se serra. — Quoi ? Qui ça ? lança-t-elle, lâchant les assiettes de stupeur.

— Une femme, continua Grimmy, essoufflé. Elle dit qu’on l’a poussée dans la rivière et qu’elle est gelée. Il faut lui apporter quelque chose de chaud !

Lanna attrapa le manteau de peau de mouton de son défunt mari et une écharpe : — Prenons la charrette, on pourra charger les bidons de lait avec elle, proposa-t-elle, la voix ferme malgré l’inquiétude.

En quelques instants, tous deux filaient vers la berge. À leur arrivée, la vieille dame, que l’on découvrirait plus tard sous le nom de Klaire Peterson, gisait maintenant dans l’herbe, recroquevillée et tremblante. Lanna la recouvrit rapidement de ses vêtements et la fit doucement monter dans la charrette.

Sur le chemin du retour, Klaire peinait à garder les yeux ouverts. Lorsqu’elle put enfin les poser sur eux, elle tenta un faible sourire :

— Ne vous inquiétez pas, ma chérie, lui murmura Lanna en serrant sa main, nous allons prendre soin de vous.

Une fois à l’intérieur, près du feu, Klaire s’efforça de remercier ses sauveurs :

— Merci, mes enfants… Que Dieu vous bénisse pour votre bonté, dit-elle en sanglotant. Merci, Lanna, d’avoir un fils si bon !

— Oh, ce n’est rien, répondit Lanna, un peu embarrassée. N’importe qui aurait fait de même.

— Non, ne dites pas ça, insista Klaire. On m’a vraiment poussée dans cette rivière.

La curiosité de Lanna s’éveilla. Dès que Grimmy fut occupé à donner le biberon au veau, elle s’installa auprès de Klaire pour entendre son histoire.

Klaire prit une profonde inspiration : — J’habitais en ville avec mon fils aîné, dans une grande maison. Ma belle-fille Lenochka était médecin ; elle veillait sur moi et surveillait mes traitements. Mais quand elle est tombée malade, tout a basculé. Mon fils a engagé une infirmière, puis Lenochka est partie en soins palliatifs. Après ses funérailles, mon fils s’est remarié avec Molly, jeune et jolie… mais elle ne me supportait pas. Elle m’a rendue la vie impossible.

Elle raconta comment Molly, peu à peu, avait voulu l’écarter : — Un jour, elle a jeté tous mes médicaments, prétendant que je n’en avais plus besoin. Elle répétait sans cesse que je ne faisais que prendre de la place. Puis, un jour, pendant que mon fils était en voyage d’affaires, Molly m’a conduite au bord de la rivière, a dit : « Nous sommes arrivées », et m’a poussée avant que je n’aie le temps de réagir.

Lanna fut horrifiée : — Comment a-t-elle pu ?

— Je ne sais pas, chuchota Klaire. Mais je suis en vie, grâce à Dieu.

Quand Lanna suggéra d’avertir la police, Klaire refusa : — Dieu jugera pour elle. Je ne témoignerai pas.

Dans les jours qui suivirent, Klaire s’installa chez Lanna et Grimmy : présence discrète aux repas, histoires de village racontées au garçon pendant que Lanna travaillait aux champs.

Un jour arriva Viktor Rudkovsky, riche philanthrope de la région : il avait entendu parler de l’hospitalité de Lanna et voulait la remercier. Il apporta un bouquet et loua sa générosité :

 

— Lanna, dit-il en admirant la ferme et les paysages alentour, vous avez créé quelque chose de vraiment spécial.

Viktor revint souvent, apportant cadeaux et aide : une machine à traire pour Zorya, un peu plus de soutien… Leur relation s’approfondit, et trois mois après sa première visite, Lanna et Viktor se marièrent. Leur amour grandit, et ils bâtirent ensemble un nouveau bonheur.

Quant à Klaire, elle retrouva la paix : elle remerciait sans cesse Lanna pour ce nouveau chapitre. Et lorsqu’elle apprit que son fils Viktor, désormais généreux, offrait son aide autour de lui, elle sourit : son propre investissement pour bien l’élever avait porté ses fruits.

Le parcours inattendu de Klaire — de la poussée dans la rivière à cette seconde chance — avait touché bien des vies. Pour Lanna et Grimmy, cela rappelait que la compassion et la gentillesse peuvent changer le cours du destin. Et pour Viktor, la famille qu’il avait autrefois délaissée était revenue, plus forte que jamais.

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